Réalisateur ancré dans son territoire, Hassen Ferhani filme Alger. Ici il s’installe dans un abattoir en pleine ville. Mais de la fonction d’un abattoir, Hassen Ferhani montre peu, à peine quelques bêtes écorchées aux détours d’un cadre, un taureau fougueux et résistant qui ne veut pas avancer ou un chat détrousseur d’intestins...Ce qu’il capte, longuement, dans des plans le plus souvent fixes ou portés par une tranquille lenteur, ce sont les espaces alentours, la cour, une rue, un terrain vague ou des locaux immenses, vides, suspendus à la fonction qui les attend. En laissant les bêtes hors champ, Ferhani s’éloigne délibérément de la mécanique du travail. Dans ces moments suspendus, il va recueillir la parole de quelques hommes, leurs liens, leurs rêves, leurs souffrances, loin des fonctions qu’ils occupent dans ces lieux. Dans ce huis-clos lent et tendre, qui s’offre des échappées presque oniriques, l’abattoir devient l’espace à partir duquel, au loin, se dessine un pays, la scène close que seul les liens d’amitiés et l’imaginaire ouvrent à l’ailleurs et aux possibles, l’espace que des hommes, coincés dans leur dure vie de labeur, franchissent en rêvant, désirant, partageant.